Paris brûle-t-il ? expo au musée de la libération de paris. le film, du vrai faux ?

Paris brûle t-il ? En quelques chiffres.

Le livre de Lapierre et Collins publié en 1964, 20 millions de lecteurs. Le film sorti en 1966, 5 millions d’entrées rien qu’en France et un budget de 6 millions de dollars. 400 000 disques 45-tours de la chanson, Paris en Colère, de Maurice Jarre et Maurice Vidalin, interprétée par Mireille Mathieu.

Le film raconte la libération de Paris, 20 ans seulement après les évènements, et met en scène des témoins toujours vivants et très attentifs à ce qui pourrait atteindre leur image.

Jean-Paul Belmondo and Marie Versini during the filming of the movie Paris Brule-T-Il? (Is Paris Burning?), directed by Rene Clement. (Photo by Henri Bureau/Sygma/Corbis/VCG via Getty Images)

Le Musée de la Libération de Paris profite du 80 ème anniversaire de la libération de la capitale française pour décortiquer ce grand classique du cinéma dont les images ont eu une telle force qu’elles se sont substituées dans l’imaginaire aux vraies images. Car comme le disent avec une pointe de dédain, Sylvie Zaidman, la directrice et et Sylvie Lindeperg, historienne et spécialiste de l’histoire du cinéma, le livre est un livre de journaliste.

La super production franco-américaine ne se prétend pas pour autant historique. René Clément s’inspire des méthodes hollywoodiennes et tournera à un rythme très soutenu avec une pléiade d’acteurs très connus. Alain Delon, Jean-Paul Belmondo, Yves Montand, Bruno Cremer, Kirk Douglas, Orson Welles;

Alain Delon & René Clement Tournage de Paris Brule t’il COLLECTION CHRISTOPHEL © Victor Rodrigue

Et son intention formulée ci dessus explique sa méthode :

Il faut faire du vrai plus vrai que le vrai et du vrai faux. Quand c’est trop vrai c’est moins bon.  Quand c’est interprété c’est meilleur, c’est ça qui est important, c’est là où est la magie. »

René Clément, réalisateur du film, Paris brûle-t-il ?, 1966.

Quel rapport le film entretient-il avec la vérité historique? L’ouvrage qui l’inspire donne la clé : présenter des petites histoires qui s’enchâssent dans la « grande Histoire». Et pour faire du «vrai faux», Clément
recourt à une fiction largement documentée par les témoignages.

En 1965, à Paris, sur le tournage d e son film « Paris brule-t-il  » le réalisateur Rene CLEMENT explique une scène à l’acteur Yves MONTAND (dans le rôle du sergent Marcel BIZIEN) . A droite l’acteur Claude RICH (dans le rôle du Géneral Leclerc.)

Son film livre des scènes tout à fait plausibles. Mais il fabrique aussi du faux vrai : le sort de la capitale n’a pas dépendu de la mansuétude de von Choltitz et rien ne corrobore la pose de mines sur la tour Eiffel.

En effet, Collins et Lapierre, les auteurs du livre, sont persuadés de la duplicité des communistes et de l’humanisme de von Choltitz. Les scénaristes, fidèles au livre, suivent la même voie.

Le mérite qui consiste à attribuer à von Choltitz d’avoir évité la destruction de Paris est aujourd’hui très contesté. Je l’ignorais.

Pour faire du «vrai plus vrai que le vrai», le réalisateur s’inspire des nombreuses traces matérielles
de la Libération, comme les armes ou les vêtements, aujourd’hui pièces de musée. Photographies et
images d’archives lui fournissent une riche documentation.

Et René Clément utilise habilement par exemple le documentaire « La Libération de Paris » tourné pendant les événements d’août 1944, qui fut très largement distribué en France et à l’étranger. Il s’inspire de certaines scènes et en intègre directement d’autres dans son œuvre.

Par ailleurs certains faits historiques sont absents du film : la signature de la capitulation de
von Choltitz à la Préfecture de police, l’arrivée de De Gaulle à Montparnasse, ou
son discours mémorable «Paris brisé, Paris martyrisé…». Bien que Paul Graetz, le producteur,
insiste pour montrer la libération de juifs à Drancy, il n’y est fait finalement aucune
allusion à l’écran.

Ces omissions sont surtout liées au contexte politique des années 1965-1966. Certains
résistants de premier plan en 1944 sont vingt ans plus tard en disgrâce auprès de leurs
anciens compagnons politiques, tels Georges Bidault complétement effacé car il sera pour l’Algérie Française.
Le livre de Collins et Lapierre les mentionne peu, et le film pas du tout.

Une exposition passionnante, tant sur le plan historique que cinématographique, très vivante et pas trop longue !!!!! Et qui montre comment les images travaillées par le cinéaste René Clément et son équipe sont à la fois une histoire de la Libération de Paris mais aussi la cristallisation de l’imaginaire collectif. 

INFORMATIONS PRATIQUES

Musée de la Libération 4 avenue du Colonel Rol Tanguy
Place Denfert Rochereau. 75014

01 71 28 34 70 www.museeliberation-leclerc-moulin.paris.fr

UN PROGRAMME DE RENCONTRES CULTURELLES EST PROPOSÉ AUTOUR DE L’EXPOSITION Entrée libre dans la limite des places disponibles

Mercredi 3 avril – 18h Rencontre « Alain Delon dirigé par René Clément, de « Plein soleil » à « Paris brûle-t-il ? » avec Denitza Bentcheva ; autrice spécialiste du cinéma.

Mardi 14 mai – 18h30 Projection-conférence « Paris brûle-t-il ?» animée par Sylvie Lindeperg, commissaire de l’exposition 

Samedi 1er juin 14h30-17 Projection du film et rencontre « Jack Lieb, cinéaste de la Libération de Paris », avec le petit-fils de Jack Lieb, Robert Marshal et Dominique Forget réalisateur Jeudi 13 juin – 18h30 Projection-conférence « Filmer la Libération de Paris : résistants, militaires, amateurs », par Sylvie Lindeperg, commissaire de l’exposition et Dominique Forget, réalisateur. 

Dimanche 25 juin – Journée de projection. Films amateurs de la Libération de Paris, avec l’association Mémoires filmiques d’Île-de-France – Cineam. 

Dimanche 23 juin 10h – 18h Événement tous publics à partir de 8 ansJournée de Wargaming pour rejouer les combats urbains de la Libération de Paris autour d’un jeu de stratégie, de plateaux et figurines. Organisé avec l’Amicale du Wargame et de la Figurine.
CATALOGUE : Paris brûle-t-il ? Quand le cinéma réinvente la Libération
Éditions Paris Musées 
Textes de Sylvie Lindeperg, avec la collaboration de Kevin Desurmont, Thomas Fontaine, Dimitri Vezyroglou, Olivier Wieviorka et Sylvie Zaidman
25 € – Format : 21 x 29 cm, broché, 112 pages, 70 illustrations.

Source la Femme Qui Marche avec/ dossier de presse de l’expo du Musée de la libération.

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