« Tu n’as pas ton permis de voiture ? Tu n’as pas 18 ans ? Aucune importance. Conduis la quand même. »
Voilà donc l’alternative branchée, coûteuse mais hyper pratique à des transports en communs jugés déficients et aux scooters jugés trop dangereux.
Baptiste, 17 ans : il pose fièrement devant sa Ligier rouge rutilante, version sport achetée 10.500 euros d’occasion avec ses sièges noirs, imitation cuir, Bluetooth, tablette tactile. Nous sommes très loin de l’image du « pot de yaourt » longtemps associée à ces engins deux places.
Baptiste est enthousiaste. Il dit « C’est hyper bien ». « Ça fait trois ans que je l’attendais. Je voulais avoir mon autonomie, j’habite une rue excentrée et mal desservie ».
Il est en terminale dans un lycée chic de la rue Paradis à Marseille, où ces voiturettes pullulent.
Laura est venue à bord de son Aixam noire mate, achetée neuve 18.400 euros. Son passager se moque d’elle : « Ce n’est que du plastique ta voiture, et un truc de bourge ». « C’est un confort », dit-elle, reconnaissant ne pas habiter si loin.
Ilan, 17 ans, lycéen également, propriétaire d’une Ligier bleue achetée 11.000 euros d’occasion explique qu’ils sont de plus en plus nombreux les jeunes à avoir ce type de voitures sans permis.
Et en effet, le nombre d’immatriculations des voitures sans permis (VSP) ont presque doublé en 4 ans en Corse. ( selon AAAdata, expert des données sur le parc automobile français, 15.500 VSP ont été immatriculées en 2020 en France, contre 13.000 en 2016 (+16%).
Un succès favorisé par la législation qui depuis 2018 les a rendues accessibles dès 14 ans, contre 16 ans auparavant. Seule obligation : les jeunes conducteurs doivent passer le brevet de sécurité routière, ou permis AM, soit huit heures de cours d’auto-école.
À Ajaccio, Alice est équipée depuis ses 14 ans d’une Chatenet CH26 achetée neuve 12.000 euros. Sa mère, Sylvie Didier, a circulé avec elle les premiers temps pour la conseiller. D’emblée, elle avait écarté l’option scooter, « trop dangereuse ».
Au début j’ai trouvé ça un peu farfelu, surtout vu le prix », reconnaît sa mère. Mais nous habitons au bout de la route des Sanguinaires, à 8 km du lycée Fesch, en centre-ville d’Ajaccio. Je ne me voyais pas laisser ma fille à la merci de « passages du bus aléatoires », ne pouvant moi-même assurer les allers-retours incessants.
– Bridées à 45 km/h –
« Les jeunes sont beaucoup mieux protégés, il sont carrossés, et contrairement aux scooters ou trottinettes électriques, ils ont une ceinture de sécurité. Ces voitures sont par ailleurs bridées à 45 km/h.
Si ces voiturettes sont chères, elles « consomment peu » et « se revendent très bien ». « Ça fait presque 4 ans qu’Alice l’a et elle cote aujourd’hui à 9.600 euros ». En revanche, « les assurances sont très coûteuses, 1.100 euros par an », et « c’est extrêmement bruyant ».
Pour conquérir une jeunesse moins aisée et concurrencer les fabricants traditionnels –principalement des entreprises familiales françaises (Aixam, Ligier, Microcar, Chatenet, Bellier)–, Citroën a lancé en mai 2020 l’Ami, une voiture électrique sans permis en forme de petit cube, vendue 6.900 euros hors bonus écologique de 900 euros.
Selon la marque française, 77% des acheteurs sont « une famille avec 2 adolescents, multi-motorisés », l’Ami étant « le 2e ou 3e moyen de mobilité du foyer », avec « plus de 40% des utilisateurs qui ont moins de 18 ans ».
La Femme Qui Marche avec /AFP