Alors ça ! Un séisme en France : le camembert ne fait plus recette. Ses ventes sont sur le point d’être dépassées par la mozzarella.
Camembert et Mozzarella rivaux ? Les deux fromages sont consommés différemment, la mozzarella utilisée en cuisine, le camembert lui dégusté.
Un changement de moeurs. La fin du plateau de fromages ?
« Un deuil, comment le meilleur fromage a-t-il pu être détrôné? », se lamente sur Facebook, Gillot, entreprise familiale de camemberts et leader français de la fabrication de camembert au lait cru, installée dans le village de Saint-Hilaire-de-Briouze, en Normandie.
Emilie Fléchard, directrice adjointe : « Mes parents mangeaient du fromage deux fois par jour. Personnellement, à part quand je reçois, je n’en mange pas à la fin du repas ».
Une tendance palpable également par Loïc Bienassis, chargé de mission scientifique à l’Institut européen d’histoire et des cultures de l’alimentation (IEHCA): « En 2011, 40% du fromage était consommé hors plateau mais depuis, cela a probablement augmenté ».
– Le camembert, une « aventure » –
Mais le désamour vis-vis du camembert s’explique aussi par une réputation, ternie au fil du temps.
Mike Bija, fromager à La Crèmerie du 17ème à Paris : « le camembert souffre d’une image vieillotte, celle d’un fromage populaire, traditionnel ».
Et de fait. Les amateurs n’ont pas le même profil d’âge: le camembert est deux fois plus consommé par les plus de 65 ans que par les moins de 35 ans. La mozzarella est au contraire achetée massivement par les moins de 35 ans.
Car la petite boule blanche italienne est pratique : « on la consomme plus en plat, dans les salades », renchérit Sakina Merazga, qui tient la boutique avec lui. « Le camembert, c’est une aventure!« , un produit exigeant, fort en goût, qui se mange seul. La mozzarella, c’est un effet de mode, un fromage de jeunes » urbains et branchés, qui accompagne une nouvelle façon de se nourrir qui se veut plus saine, plus légère…
La Crèmerie vend d’ailleurs un « camembert » au lait de bufflonne, sorte de synthèse crémeuse et osée des deux rivaux, à destination des clients rebutés par le goût trop prononcé du camembert.
Mais derrière la perte globale de vitesse du camembert, se cachent des réalités très différentes.
Au niveau du goût comme du prix (presque deux fois plus élevé en moyenne), pas grand-chose à voir entre un camembert AOP de Normandie et un camembert industriel standardisé.
Pour obtenir le label « Appellation d’origine protégée », les producteurs doivent répondre à certains critères : moulage à la louche, lait cru… Une sévérité qui garantit un goût inégalé et un respect de la tradition.
Chez Gillot, où l’on produit notamment de l’AOP, la fabrique est une véritable ruche et les employés s’affairent dans un incessant ballet : « Nos ventes progressent depuis huit ans », se félicite Emilie Fléchard.
Selon l’Association de défense et de gestion de l’AOP Camembert, les ventes ont augmenté de 20% entre 2014 et 2020.
« Les gens veulent manger moins mais de meilleure qualité ».
Mais cette production ne représente qu’un peu moins de 10% du tonnage global. L’écrasante majorité du camembert est produit par des géants industriels comme Lactalis, et vendus en supermarchés.
Si l’industrialisation a assuré sa popularité au camembert, elle en a aussi affadi le goût.
Le camembert industriel devenir vite plâtreux en bouche et perd en saveur quand les AOP conservent de grandes qualités gustatives.
« Dans un certain sens, on peut comparer le camembert avec la baguette qui, très industrialisée dans la seconde moitié du XXème siècle, a été critiquée pour son goût insipide ».
La Femme Qui Marche avec / AFP.