« Une histoire de France digne de ce nom commence, au moins depuis Michelet, par un tableau géographique » : vous voilà prévenus tout de go si vous en doutiez.
Cet Atlas historique de la France réunit 375 cartes qui proviennent pour la plupart du fonds de la revue Histoire mais dont certaines sont originales. Il s’agit de comprendre comment l’hexagone s’est construit. Cette « métaphore géométrique s’impose à la fin du XIX ème siècle dans le cadre de l’école républicaine : la référence mnémotechnique est un prétexte pour magnifier l’équilibre et la perfection du territoire national ».
Les cartes vont de pair avec des commentaires qui donnent à lire les faits mais pas forcément l’explication. Libre à chacun de se faire la sienne, ou d’aller la chercher.
La carte de la peste de Marseille (p 110) en 1720 parlera à tous en ces temps de Covid-19. Elle dessine notamment le blocus de la ville, le cordon sanitaire chargé d’isoler la région et ce que l’on a appelé le Mur de la peste. Un rempart bâti pour protéger de l’épidémie le comtat Venaissin, terre pontificale. Une muraille sanitaire de 27 km entre la Durance et le Mont-Ventoux, aujourd’hui lieu de randonnée depuis Carpentras jusque Cabrières d’Avignon avec sur le chemin l’abbaye de Notre-Dame de Sénanque.
Comment mieux comprendre le travail effectué par l’Assemblée constituante en 1790 qu’en comparant les pages 122 et 123. A gauche, l’enchevêtrement des différentes circonscriptions de la France avant la Révolution. Un mille-feuilles… »Elles répondent chacune à une logique militaire, fiscale, religieuse, judicaire »…. Bref on n’y comprend rien. A droite, la France divisée en départements selon un découpage qui se veut homogène : la taille de chaque département doit permettre de se rendre de n’importe quel point du département au chef-lieu en moins d’une journée de cheval.
Les cartes des vignobles français au XVIII ème siècle montrent que les grands crus sont pratiquement les mêmes qu’aujourd’hui sauf que l’Ile- de- France est la première région viticole.
L’Ile-de-France, le sud-ouest du Bassin Parisien précisément qui avec la Bresse, le Dauphiné, et le Massif Central concentrent les attaques des loups anthropophages. Les loups mangent les cadavres de la population dans les périodes qui suivent les conflits et les famines et y prennent goût… (p 108). Ce n’est plus là qu’on les trouve de nos jours.
Les cartes de l’affaire Dreyfus (page 176) permettent de resituer les lieux de ce drame. On y voit par exemple l’emplacement des grands lycées parisiens qui représentent les viviers des manifestants antisémites : Condorcet au nord, Turgot à l’est, Louis -le-Grand et Henri IV au sud et Jean-Baptiste-Say à l’ouest.
Ces dernières années, les présidents de la république ont multiplié les commémorations. On voit de façon criante (p 265) par exemple que le sud-ouest reste un désert commémoratif mais qu’en revanche Verdun, les plages du débarquement ou le Panthéon et les Invalides à Paris font toujours recette. Et cela même si le souvenir de la colonisation et de la décolonisation empiète désormais sur le souvenir des guerres mondiales.
Voilà donc quelques exemples auxquels on peut ajouter les batailles du XV ème au XVIII ème siècles regroupées (p 100)sur une seule et même carte, celle des voyages des philosophes (p 114), ou celles des mémoires industrielles et ouvrières (p268)…..
Au fond cet atlas historique de la France aux Editions Les Arènes, cadeau de noël sympa, conviendra à beaucoup : historiens et géographes bien sûr, étudiants, amateurs, et à ceux désireux d’apprendre. Comme un livre de chevet, on le lira en respectant la chronologie selon le parti pris de l’ouvrage ou en picorant par ci par là selon son humeur.
Atlas Historique de la France. Christian Grataloup avec Charlotte Becquart-Rousset. Préface de Joël Cornette. Editions les Arènes. EAN : 9791037502612
318 pages. 24,90 euros.
